Article (traduit de l’anglais) paru dans le magazine Goodness, le 15 decembre 2019.
La période qui s’étend de Saint Nicolas (le 6 décembre pour nos amis non-belges) au Jour de l’An s’apparente à un tourbillon de contradictions. Les repas gargantuesques se mêlent aux injonctions de régimes amaigrissants. Le désir de tisser des liens avec la famille et les amis est entâché par leurs commentaires parfois grossophobes et blessants. Les nuits tardives et les engagements sociaux obligatoires nous interdisent de trouver le repos que nous espérions ; c’est une période de l’année où les émotions sont intenses et parfois compliquées à gérer.
Et pour ceux/celles d’entre nous qui ont l’habitude de compter leurs calories ou de limiter leur apport nutritionnel, le fait d’être confronté.e.s à de grandes quantités d’aliments délicieux (que l’on s’interdit généralement), ainsi qu’aux défis sociaux énumérés ci-dessus, peut provoquer des sentiments encore plus inconfortables, comme la culpabilité, la honte, un sentiment de fixation sur la nourriture ou de perte totale de contrôle autour des aliments.
Mais il est possible de faire à nouveau rimer vacances avec insouciance. Voici mes trois conseils de survie pour profiter des Fêtes, sans culpabilité :
Retrouver le plaisir de manger
Afin de garantir la survie humaine, manger est depuis toujours un acte intimement lié au plaisir. Se sentir vraiment « nourri.e » n’implique pas uniquement l’ingestion d’une selection spécifique de nutriments (sinon nous serions déjà en train de vivre de poudres et de sachets estampillés « nutritionnellement parfaits »).
L’apparence des aliments, la compagnie qui nous entoure, notre état d’esprit, de récents efforts pour nous restreindre, les récits et croyances que nous, comme individus ET comme culture, avons à propos des aliments et du poids : tout cela joue un rôle important, pas seulement dans notre façon d’aborder la nourriture, mais également dans notre capacité à en ingérer les nutriments de manière optimale.
Les personnes les plus soucieuses de leur régime alimentaire (aheum, poids) craignent généralement que les vacances ne les amènent à « faire des excès ». Si c’est votre cas, et au lieu d’éviter les occasions sociales, je vous encourage à reconsidérer ces « excès » pour constater qu’ils sont généralement largement inoffensifs.
C’est parti.
Premièrement, « trop manger » se définit de manière très différente selon la personne concernée. Si vous comptez constamment les calories, limitez les groupes alimentaires ou ignorez fréquemment vos sensations de faim, il y a de fortes chances pour que vous ne mangiez en réalité… pas assez. Et de nombreuses recherches démontrent que les comportements alimentaires « émotifs » ou « excessifs » ne trouvent pas leur source dans un manque de volonté, mais dans une restriction chronique. Ils apparaissent dès lors en réponse physiologique à la faim, chez les personnes qui pratiquent une alimentation contrôlée ou restreinte.
Plus simplement : plus vous craignez de « trop manger » et plus vous vous interdisez les aliments que vous aimez, plus vous avez de chances de faire des excès lorsque vous en avez l’occasion. En revanche, retrouver une relation plus intuitive à la faim et à la satiété, et s’offrir un recadrage positif de la nutrition autour du plaisir et de la relaxation, est un excellent moyen pour retrouver des habitudes alimentaires plus sereines et dire adieu à la culpabilité, aux remords, à la honte, et aux reproches autour des repas.
Deuxièmement, les preuves scientifiques confirment que le métabolisme humain est parfaitement capable de maintenir un « poids de référence« . Il brûle les calories considérées « excessives » et ne les conserve qu’en cas de famine. Par conséquent, si vous faites confiance à votre corps et écoutez vos sensations de faim et de satiété au mieux de vos capacités, tout en laissant votre corps retrouver le poids auquel il revient naturellement (pas celui que tante Agathe vous recommande pour attirer plus de prétendants), la recherche montre que quelques repas plus copieux n’affecteront peu ou pas votre apparence.
Enfin et surtout, si un ensemble d’industries profitant de nos insécurités ne nous rappelait pas sans arrêt nos imperfections et notre besoin intrinsèque d’une solution rapide [pour perdre de poids], il y a de bonnes chances que nous ne considérions même pas les « excès » des fêtes comme un « problème ». De même, l’idée que la nourriture que nous mangeons pendant les fêtes peut être immorale, décadente ou même un pêché est absurde. La nourriture n’a aucune valeur morale. De la même manière, la minceur n’équivaut pas automatiquement à la beauté et le lien entre poids et santé est un lien de corrélation et non de causalité. En remettant en question la croyance selon laquelle la minceur est un objectif moralement supérieur, nous soulignons l’obsolescence de la pesée quotidienne. Nous permettons aussi à tous les corps d’être considérés avec respect et justice. Et nous reconnaissons que manger « émotionnellement » pendant la folie des fêtes est, en réalité, une façon largement inoffensive pour les humains de gérer leurs émotions….
Alors, s’il vous faut déboutonner votre pantalon après le délicieux repas de Noël de votre maman, n’oubliez pas d’être indulgent.e.s envers vous-même, de montrer votre gratitude pour ce moment de joie partagée qui unit famille et amis une seule fois par an. Permettez-vous de reconnaître que depuis des siècles, les célébrations humaines sont associées à une alimentation abondante. Vous n’avez rien fait de mal et l’humanité ne s’effondrera pas. (Si elle s’effondre, ce ne sera certainement pas à cause de votre troisième part de gâteau).
Dire ‘non’
Il est beaucoup plus simple d’instaurer ses propres limites que de contrôler ce que les gens pensent de vous. Si vous ne pouvez vraiment plus faire face au moindre commentaire humiliant de tante Agathe, votre moi adulte peut decider de prendre vos distances. Celles-ci peuvent sembler être une immense montagne à escalader au début, surtout pour ceux/celles qui ont l’habitude de se couper en douze pour les besoins des autres. Mais la réalité est que pendant les vacances (et à tout autre moment de l’année), VOUS pouvez organiser votre temps et investir votre énergie comme bon vous semble.
Donc, si vous le pouvez, planifiez à l’avance : choisissez vos occasions sociales, prévoyez du temps de récupération, intégrez suffisamment de self-care et de repos à votre programme. Dans la mesure du possible, donnez la priorité aux personnes capables de respecter et de soutenir vos besoins, et évitez celles qui sapent votre énergie ou déclenchent des comportements alimentaires ou d’image corporelle néfastes.
Pour les invitations de dernière minute, prenez le temps de réfléchir avant de répondre : évaluez votre réponse intuitive à cette occasion sociale, à la préparation qu’elle implique de votre part, aux personnes qui seront présentes, et à leur respect de vos besoins. Si (et seulement si) cet événement vous apporte de la joie, suivez les bons conseils de Marie Kondo et confirmez-le. Sinon, déclinez. Si vous êtes obligé.e.s d’aller de l’avant en sachant qu’un événement peut être stressant, prévoyez plus de self-care avant et après. Cela peut consister en du repos, tenir un journal, écouter votre musique préférée, rendre visite à votre thérapeute, faire une longue promenade dans la nature, des exercices de méditation ou de pleine conscience, des étirements en douceur ou un échange avec un.e confident.e.
Rediriger les conversations
Si vous souffrez de troubles du comportement alimentaire ou d’image corporelle, une bonne façon de composer avec l’anxiété des fêtes consiste à communiquer à l’avance à votre famille et à vos amis que vous aimeriez que les célébrations restent une zone « zéro commentaires corps ou alimentation » pour tous. Bien sûr, tante Agathe y perdra son sujet de conversation principal, mais cela pourrait aussi l’encourager à ÉCOUTER les autres (pour une fois).
Si rien de tout cela n’est possible pour vous, et si les conversations sur les régimes ou le fitness vous irritent ou vous ennuient à mourir, sachez qu’il est permis de rediriger les conversations vers des sujets plus enrichissants. J’adore ces affirmations de l’activiste Ragen Chastain, pour faire respecter vos limites personnelles.
Merci de votre intérêt, mais je ne crois pas que nous puissions juger la santé d’une personne en fonction de son apparence, et c’est un choix personnel de ma part de ne pas participer aux discussions sur le corps et les régimes.
Je n’ai absolument aucune envie de discuter de mon régime alimentaire avec vous.
Je ne sollicite pas d’opinions sur mes choix alimentaires.
Mon corps est le compagnon qui m’aide à faire chaque chose que je fais chaque seconde de chaque jour. A cet effet, il mérite respect et admiration.
Bonne chance ! Passez de joyeuses fêtes de fin d’année sans culpabilité !