Pendant ma rémission de plusieurs années de troubles du comportement alimentaire, découvrir les principes de la ‘Santé à toutes tailles’ (en anglais, Health At Every Size, ou HAES) m’est apparu comme une révélation. Depuis 2016, les principes HAES me guident en tant que femme et mère. HAES soutient également mon objectif plus large de justice sociale, de soins respectueux, sans discrimination, sans préjugé ni a priori, qui accompagne mon travail de coach. C’est pourquoi il était important pour moi de devenir membre officiel de l’’Association pour la diversité des tailles et la santé’ (ASDAH).
Ici, j’explore les principes qui structurent HAES et pourquoi c’est la seule méthode scientifiquement prouvée pour améliorer durablement la santé des individus, peu importe leur poids.
D’où vient le terme ‘Santé à Toutes Tailles’ (HAES) ?
Ce terme ne désigne pas une situation ou tout le monde serait en bonne santé. Il s’agit plutôt d’une nouvelle manière d’envisager la santé, sans se concentrer sur un poids ‘idéal’ à atteindre à tout prix et en acceptant qu’il existe dans le monde une large diversité des corps, des tailles et des apparences. Cette mouvance est conçue par Dr Linda Bacon au début des années 2000. Ayant démarré sa carrière comme psychothérapeute spécialiste des troubles du comportement alimentaire et de la dysmorphophobie, Dr Bacon a ensuite obtenu un Master en sciences de l’exercice, puis un doctorat en nutrition et gestion du poids. Au cours de ses années de recherche indépendante, Dr Bacon réalise que le poids et l’IMC ne prédisent aucunement la santé et la longévité des individus, et que les régimes ‘conventionnels’ (restrictifs et accompagnés d’une propension à l’exercice compulsif) sont non seulement inefficaces pour la perte de poids, mais causent plus de dégâts à long terme, car ils intiment à notre corps l’ordre de freiner la création de muscle et de ralentir le métabolisme. Ils introduisent également les notions de culpabilité et de honte dans notre relation à la nourriture, renforçant ainsi la stigmatisation des corps considérés ‘hors normes’.
Dr Bacon prouve sa théorie grâce à une expérience unique menée sur un groupe de femmes ayant un IMC de 30 à 45 qui souhaitait améliorer leur cholestérol, pression artérielle et autres indicateurs de santé. La moitié du groupe fut encouragée à suivre la voie des régimes et de l’exercice ‘traditionnel’ et l’autre moitié, à appliquer les principes HAES (mentionnés ci-dessous). Après une année, les résultats étaient unanimes : dans le groupe des régimes ‘traditionnels’, la moitié des participantes abandonnèrent avant la fin de l’année (si vous avez jamais suivi un régime restrictif sur une periode de douze mois, vous comprendrez exactement pourquoi), et l’autre moitié, après une perte de poids initiale, était de retour à son poids et niveaux indicateurs de départ. Dans le groupe HAES, bien que le poids des participantes n’ait pas ou peu changé non plus, tant leur état d’esprit que leurs indicateurs de santé avaient évolué positivement, ET elles avaient découvert de nouvelles façons de prendre soin de leur santé et de leur corps dans une perspective de compassion, dénuée de culpabilité. De cette expérience sortit une série de principes et le mouvement HAES était né ! Il repose sur les quatre principes suivants :
Principe #1 : Honorer nos différences et accepter la diversité des corps
Avez-vous déjà remarqué qu’être ‘naturellement mince’ est socialement accepté, mais pas l’inverse ? C’est une des nombreuses manifestations pernicieuses de la grossophobie. Mais la réalité n’est pas si manichéenne: les études scientifiques indépendantes menées sur le poids démontrent que nous avons tous une fourchette de poids ‘idéale’. Non pas dans le sens commun des proportions parfaites pour être en couverture de magazines, mais qui se comprend comme un poids où notre corps, notre métabolisme, notre santé est dans son état optimal, sans pour autant devoir nous obséder avec un régime particulier ou un certain montant d’exercice à effectuer. Cette fourchette de poids idéal ne s’observe pas uniquement dans la partie ‘mince’ de la population, elle englobe tous les poids, à la seule exception des extrêmes.
Il est également prouvé que lorsque le corps est forcé à restreindre son apport calorique, il perçoit cela comme une semi-famine, et décide intuitivement de ralentir son métabolisme, afin de conserver au mieux le peu d’énergie reçu et de se protéger en cas de famine avérée. De ce fait, le corps prend du poids ou n’en perd plus, c’est l’effet inverse à celui recherché. Même si une industrie puissante nous répète que ce résultat provient de notre inaptitude profonde et personnelle à ‘respecter’ le régime de maniere stricte (la perte de poids représentera un marché global juteux de 279 milliards de Dollars en 2023, selon Orbis Media), c’est completement faux. Au contraire, ce ralentissement est un processus naturel de notre corps pour nous protéger en s’assurant de toujours tendre vers notre poids ‘idéal’.
C’est aussi pourquoi 95% des personnes ayant perdu du poids grâce un régime restrictif le reprennent (et plus) endéans les deux à cinq ans. En réalité, faire le yo-yo entre perdre et reprendre est plus dangereux pour la santé que de rester à un poids stable, même s’il est élevé. Donc si la santé nous importait réellement, au lieu de blamer les gens en surpoids, nous ferions mieux pour permettre à tous d’accéder à des soins de santé décents, à une sécurité alimentaire et physique, à des aliments de qualité.
Principe #2 : Les nombreuses facettes de la santé
Comme la santé n’est pas QUE physique, elle ne peut être réduite à un nombre (Et surtout pas à l’IMC, indice obsolète et sans grande valeur scientifique. Lisez en plus dans ce post). Il faut aussi considérer la santé sociale, émotive, mentale, qui agissent comme des adjuvants ou opposants puissants pour le bien-être des individus, tout comme leur securité, leur situation financière, leur accès à des repas équilibrés ou à des soins de santé de qualité.
Principe #3 : Ecouter son corps, et manger pour son bien-être
Si vous suivez un régime alimentaire rigide, vous savez que peu d’entre eux mettent en avant le plaisir. Mais saviez-vous que le plaisir influence la valeur nutritionnelle de nos aliments ? Dans une étude menée en 2000, des chercheurs de Suède et de Thaïlande ont découvert que les préférences culturelles et de goût affectent notre absorption de nutriments. Des femmes thaïlandaises et suédoises furent soumises à des tests avec leurs plats ‘nationaux’ (curry thaï contre hamburger, haricots et purée suédois), contenant tous les deux un montant identique de fer. Les femmes thaïlandaises ont absorbé beaucoup moins de fer en consommant le repas suédois, et plus de fer en mangeant le curry thaïlandais qu’elles connaissaient et appréciaient. Même résultat pour les suédoises, ou si le plat favori des femmes, peu importe leur origine, était réduit à l’état de purée dans un mixeur (beurk) [ii]. HAES nous encourage à nous reconnecter aux signes de notre corps et à la façon unique dont notre métabolisme nous informe sur ce qu’il aime ou ce dont il a besoin. Et au cas où vous en doutiez encore, cela n’a rien à voir avec les calories ou grammes de macro-nutriments consommés. Non, nous naissons tous avec une capacité innée de ressentir la faim et la satiété.
Principe #4 : retrouver la joie du mouvement
Quand on cherche à perdre du poids, notre vision de l’exercice est rationnée en calories à brûler, en rythmes cardiaques à atteindre, en intensité ou en minutes. Mais on sait que quand l’exercice est dénué de plaisir, et s’allie à un sentiment d’appréhension, voire de honte ou de culpabilité, il n’est pas une habitude durable et n’améliore que peu ou pas la santé. HAES encourage tout un chacun à trouver ce qui les motive à bouger, non dans une perspective de poids ou dans l’optique de transformer son ventre en fameuses ‘tablettes de chocolat’, mais afin que ce mouvement apporte de la joie et du plaisir, s’intègre sans difficulté dans nos vies, et devienne un allié à long terme, de notre santé, physique et mentale, en tant que pratique de self-care. Tout type de mouvement est accepté : même le jardinage ou pouponner des enfants en bas âge compte, et suer à profusion ou compter les minutes n’est pas du tout nécessaire. Le bénéfice provient de bouger de manière régulière et joyeuse, durablement, tout au long de la vie.
Pour en savoir plus sur HAES, vous pouvez en lire plus sur le site de l’ASDAH ou vous signer une promesse en ligne. Si vous avez des questions sur la façon d’implémenter ces principes dans votre vie de tous les jours, je suis disponible pour y répondre et vous coacher vers une approche durable et inclusive de la gestion de votre santé !
[ii] “Food that tastes good is more nutritious” reported in Tufts University Health and Nutrition Letter, October 2000